Fusions-acquisitions : cinq questions à un expert

Quelles sont les conditions gagnantes pour qu’une entreprise réussisse ce genre d’opération?

Benoit Leroux Par Benoit Leroux Suivez-le sur LinkedIn

Avec la collaboration de :
Suivez-la sur LinkedIn  Julie Proulx  et Suivez-la sur LinkedIn Emmanuelle Héroux 


Pour les entreprises qui s'engagent dans une fusion ou une acquisition, il s'agit souvent d'un moyen d'accroître leur part de marché, de diversifier leur offre, d'élargir leur présence géographique ou d'assurer la relève. Comment réunir les conditions gagnantes pour réussir ce genre d'opération? Y a-t-il un moment idéal pour se lancer dans l'aventure? Des pièges à éviter? Pour le savoir, nous avons rencontré Benoit Leroux, directeur des investissements, Services financiers, au Fonds de solidarité FTQ.

Bonjour M. Leroux. Vous avez accompagné de nombreuses entreprises dans leur fusion ou leur acquisition. Y a-t-il des défis propres à ce genre de transaction?

B.L. : Oui, plusieurs. Le premier qui me vient à l'esprit, c'est la compatibilité entre les cultures. Si votre critère numéro un est le service à la clientèle alors que les actionnaires de l'autre entreprise privilégient le rendement du capital, la «  sauce  » ne prendra pas. La transition ou l'intégration sont également des moments clés. Il faut prendre le temps d'assurer la continuité entre la direction existante et les repreneurs, tout en veillant à ce que ceux-ci tiennent compte des valeurs de l'entreprise, comme ce fut le cas pour la vente de l'Agence CartierAttention, ce lien ouvrira un nouvel onglet., où la direction a écarté plusieurs offres très intéressantes au profit d'une équipe de relève plus en phase avec sa vision et ses valeurs. Il faut aussi communiquer clairement avec les employés et les clients pour faciliter la gestion du changement et éviter une érosion de la valeur de l'entreprise. Enfin, il faut se fixer un échéancier et s'y tenir. Comme j'aime le dire, «  tout ce qui traîne se salit  ».

«  En fait, l'aspect humain d'une transaction peut être le plus gros obstacle à sa réalisation, ce qui met en relief l'importance d'une bonne relation entre les parties prenantes. »

Selon vous, y a-t-il des conditions propices au succès de ce genre de transaction?

B.L. : Tout à fait! À commencer par une bonne santé financière et une équipe de direction expérimentée, car c'est une opération exigeante à réaliser et à intégrer. On parle facilement de six à neuf mois de travail intensif pour la haute direction, puisqu'elle est au cœur des négociations. Ses membres doivent donc être habitués à travailler ensemble et avoir une dynamique bien rodée. Dans le cas d'une entreprise en forte croissance, les dirigeants doivent pouvoir continuer de se consacrer aux opérations et donc bien s'entourer pour «  garder les mains sur le volant  » de l'entreprise.

Justement, comment bien s'entourer? À qui faire appel?

B.L. : Il faut de préférence faire affaire avec un partenaire d'investissement qui possède une connaissance approfondie du secteur d'activité visé par l'entreprise. On parle d'un investisseur à l'affût des tendances et des enjeux du secteur, qui connaît bien le marché et qui peut faire du maillage d'entreprises, le cas échéant. C'est un atout de taille.

Un investisseur d'expérience peut aussi apporter à l'entreprise les ressources externes qui lui manquent pour couvrir tous les angles : experts du marché, de la fiscalité, du droit, de l'évaluation, des ressources humaines, de la vérification et du financement. Cette équipe multidisciplinaire apporte une vraie valeur ajoutée, car elle permet d’examiner la transaction sous toutes ses facettes. C’est ce que nous avons fait dans le cadre de la fusion entre le regroupement de La Capitale et de SSQ assurance, ce lien ouvrira un nouvel onglet., un dossier très complexe. L'entreprise bénéficie ainsi d'une revue diligenteAttention, ce lien ouvrira un nouvel onglet. objective et impartiale afin de prendre sa décision en toute confiance.

Y a-t-il des modèles ou des stratégies de financement à privilégier pour les fusions-acquisitions?

B.L. : Tout dépend de ce qu'on recherche. Si un client est allergique à la dilution de ses parts, par exemple, l'investisseur peut lui offrir des débentures et des actions privilégiées – c'est une solution gagnant-gagnant qui permet à l'entreprise de conclure sa transaction et à l'investisseur d'obtenir un rendement acceptable. À l'inverse, certains clients qui ont investi leur patrimoine dans leur entreprise souhaitent retirer une partie de l'argent qui s'y trouve. Dans ce cas, l'investisseur peut injecter des capitaux dans la société, dont une portion sera versée à l'entrepreneur. Cette transaction permet à l'entreprise de poursuivre sa croissance et au client de partager les bénéfices et les risques avec le partenaire d'investissement. Selon le montant et les objectifs du financement, il arrive aussi que plusieurs partenaires d'investissement s'allient pour permettre au client de réaliser sa transaction, comme ce fut le cas du rachat de Canam par la famille DutilAttention, ce lien ouvrira un nouvel onglet., qui cherchait à rapatrier la propriété de l'entreprise au Québec.

Bref, il existe un éventail de stratégies possibles qui doivent tenir compte des besoins et des objectifs du client, d'où l'avantage d'avoir accès à des solutions de financement créatives et flexibles qui lui permettront de conserver une marge de manœuvre en cas d'imprévu. Par ailleurs, on a beau essayer de tout prévoir, une transaction peut nous réserver des surprises. Avoir un partenaire axé sur le long terme, qui nous accompagne «  beau temps, mauvais temps  », c'est donc important et rassurant.

Au-delà de l'expertise sectorielle et du financement, l'investisseur peut-il aussi agir comme conseiller auprès de l'entreprise?

B.L. : Bien entendu! L'investisseur peut et doit accompagner l'entreprise, conseiller ses dirigeants – cela fait partie de ses attributions. Ces conseils peuvent porter sur la stratégie, l'évaluation, la négociation de la transaction, etc. Mais quelle que soit leur nature, ils seront d'autant plus pertinents que les deux parties auront développé une relation de confiance mutuelle.

« En tant qu'entreprise, il faut donc s'orienter vers un partenaire de financement qui accorde de l'importance à l'aspect humain de la relation, car ces échanges, formels et informels, jouent souvent un rôle capital dans les prises de décision. »

Un dernier conseil?

B.L. : Chaque transaction est unique, tout comme les personnes et les entreprises qui s'engagent dans ce processus. Si vous envisagez une fusion ou une acquisition, prenez le temps d'en discuter avec un partenaire financier de confiance, car nous avons tous le même objectif, au final : que cette opération soit un succès pour toutes les parties concernées!

Lors du récent Gala Les Prix M&AAttention, ce lien ouvrira un nouvel onglet. [Québec], qui reconnaît l'excellence des professionnels en fusions et acquisitions, deux représentantes du Fonds de solidarité se sont distinguées. Félicitations à toutes les deux!

  • Julie Proulx, gagnante dans la catégorie Transaction de capital-investissement de l'année (acquisition d'une participation majoritaire dans le rachat de Canam)
  • Emmanuelle Héroux, finaliste dans la catégorie Transaction de capital-investissement de l'année (acquisition d'une participation minoritaire dans Groupe Access) et dans la catégorie Transaction de financement par emprunt de l'année (vente de l'Agence Cartier)