Travailleur autonome vs salarié : 5 éléments à garder en tête lorsqu'on planifie sa retraite
Assurez-vous de bien comprendre ce qui distingue votre réalité de celle des salariés.
Pour le travailleur autonome, l'épargne-retraite n'est pas toujours une priorité. Après tout, il doit déjà investir beaucoup d'énergie à développer ses affaires, tout en essayant de maintenir un équilibre de vie. De plus, contrairement au salarié, il n'a pas de coup de pouce de son employeur pour planifier sa retraite. Voici cinq éléments à considérer pour l'épargne-retraite du travailleur autonome parce qu'il n'est jamais trop tôt pour commencer à mettre des sous de côté et que se libérer de son patron entraîne des responsabilités en matière de finances personnelles.
01Anticiper des revenus variables
D'après un sondage réalisé en 2017 pour l'Association canadienne de la paieAttention, ce lien ouvrira un nouvel onglet., près de la moitié des employés canadiens vivent d'une paie à l'autre et auraient de la difficulté à s'acquitter de leurs obligations financières si leur chèque était retardé d'une semaine. Or le travailleur autonome a plusieurs bonnes raisons d'éviter de tomber dans ce piège parce que, très souvent, les semaines se suivent mais ne se ressemblent pas en matière de quantité de travail à réaliser et de revenus. Une réalité qui s'applique aussi aux salariés à pourboire. Cependant, malgré des revenus variables, on devrait épargner chaque mois pour sa retraite si l'on veut s'assurer de vieux jours agréables. De plus, les clients prennent parfois plusieurs semaines, voire plusieurs mois avant de payer leurs fournisseurs. On est loin de la paie hebdomadaire ou bimensuelle du salarié. Le travailleur autonome doit donc prévoir le coup, sans pour autant sacrifier son épargne-retraite.
Travailler à son compte implique aussi de penser aux acomptes provisionnels à payer quatre fois par année aux gouvernements provincial et fédéral. C'est un peu l'équivalent des retenues à la source prélevées sur la paie des salariés en vue de leurs impôts. Les acomptes provisionnels varient selon le revenu gagné. Ils peuvent donc rapidement devenir des montants substantiels à prévoir lorsqu'on se lance à son compte. Il vaut mieux les inscrire à son budget, en plus de l'épargne-retraite.
02Construire sa stratégie d'épargne
Pour mieux jongler avec tous ces éléments de finances personnelles, le travailleur autonome a tout à gagner à mettre rapidement en place une stratégie d'épargne avec un conseiller financier.
Par quoi devrait-on commencer? Généralement, par accumuler un coussin de sécurité pour pouvoir subvenir à ses besoins pendant quelques mois en cas d'urgence et enlever une bonne dose de stress. Par ailleurs, la stratégie devrait intégrer un volet d'épargne-retraite qui tiendra compte des variations de revenus au fil des semaines et des mois.
L'idéal est de se fixer un objectif réaliste pour éviter de transformer l'épargne automatique en poids dans les moments difficiles. Personne ne veut épargner s'il doit se priver à l'épicerie et refuser les invitations de ses proches! L'épargne-retraite doit s'inscrire dans la durée. Pour bien gérer ses fluctuations de revenus, il peut également être intéressant de garder dans son compte chèques une petite portion de son coussin de sécurité… À condition, bien sûr, de le remplumer lorsque la période creuse est terminée!
Il faut prendre le temps de choisir les bons types de comptes pour épargner selon ses besoins en matière de fiscalité. Par exemple, pour l'essentiel de votre acompte provisionnel, le compte épargne à intérêt élevé est à envisager puisque vous pouvez y réaliser des retraits, comme votre dû aux gouvernements à court terme, sans qu'il y ait d'incidence fiscale.
Quand vient le temps de penser à la retraite, le régime enregistré d'épargne-retraite (REER) a pour sa part l'avantage d'offrir des déductions d'impôt sur vos revenus déclarés. Il est d'ailleurs un grand allié du travailleur autonome qui, sans employeur, doit mettre lui-même suffisamment d'argent de côté pour sa retraite.
Le compte d'épargne libre d'impôt (CELI) est aussi à envisager puisque les sommes qu'on y dépose croissent à l'abri de l'impôt. Il peut être particulièrement intéressant lorsqu'on commence comme travailleur autonome et que les revenus sont encore trop minimes pour avoir un haut taux d'imposition. Cette stratégie permet d'épargner tout en conservant les droits de cotisation au REER pour plus tard, lorsque le revenu sera plus élevé. En raison de la facilité avec laquelle on peut accéder à l'argent épargné, le CELI est aussi pertinent lorsqu'on veut concrétiser un projet à court ou à moyen terme.
L'avantage de commencer tôt à mettre de l'argent de côté est que cela permet de bénéficier du rendement potentiel de ses placements, sans oublier les intérêts composés : le rendement qu'on a sur son investissement initial auquel on ajoute celui sur l'intérêt gagné. Ça peut monter vite! C'est aussi pourquoi il peut être avantageux de commencer dès que possible, avec un petit montant, à automatiser votre épargne. En cotisant régulièrement grâce à des prélèvements bancaires automatiques, vous vous assurez de participer à votre épargne-retraite en continu. Vous avez aussi la possibilité de modifier le montant de vos cotisations en fonction de l'évolution de votre situation financière.
03Considérer les régimes de retraite gouvernementaux
S'il y a l'épargne-retraite, il y a aussi les régimes de retraite gouvernementaux qui sont àconsidérer, même s'ils risquent de ne pas être suffisants pour bien vivre.
D'abord, il y a le Régime de rentes du Québec (RRQ). Un retraité de 65 ans qui commence à recevoir sa rente en 2024 a droit au montant maximal et obtiendra mensuellement 1 364,60 $. Si ce même retraité attend jusqu'à 72 ans avant de demander sa rente, il obtiendra 2 166,98 $. Le montant de la rente versée est imposable et sera indexé chaque année sur le coût de la vie.
Le travailleur autonome doit savoir que si le salarié paye seulement la moitié de sa cotisation annuelle totale à la RRQ – l'autre étant payée par son employeur – il doit lui, la payer entièrement. Il s'agit de 12,8 %de ses revenus annuels, à partir de 3 500 $ et jusqu'à 68 500 $ en 2024, et 8,0 % de cotisation supplémentaire sur le revenu entre 68 500 $ et 73 200 $. Mais la bonne nouvelle est que ces montants sont compris dans les acomptes provisionnels versés au gouvernement. C'est une chose de moins à laquelle il faut penser!
Au gouvernement fédéral, la pension de la Sécurité de la vieillesse est financée à même les recettes fiscales, donc les travailleurs n'ont pas à y cotiser directement. On peut la recevoir à partir de 65 ans, et c'est un revenu imposable. En 2024, le paiement mensuel est de 713,34 $, mais le montant sera inférieur si la personne n'a pas vécu toutes ses années au Canada depuis ses 18 ans.
En additionnant les deux, il risque d'être difficile de profiter pleinement de sa retraite. De plus, contrairement à certains salariés, le travailleur autonome ne peut pas compter sur une caisse de retraite offerte par son employeur. D'où l'importance d'y ajouter de l'épargne personnelle et de diversifier ses revenus de retraite.
04Évaluer ses besoins en assurances
Grâce à leur employeur, certains salariés ont un régime d'assurances collectives qui peut inclure les soins médicaux, visuels et dentaires, en plus d'une assurance invalidité. Ce n'est évidemment pas le cas du travailleur autonome.
S'il a un conjoint couvert par un régime d'assurances privé, il doit s'y inscrire aussi. Du moins, pour la portion des médicaments. Sinon, il devra opter pour le régime public d'assurance médicaments (RAMQ), avec une prime annuelle à payer dans sa déclaration de revenus, déterminée en fonction de son revenu familial. Ou encore, prendre sa propre assurance dans un régime privé dont la prime peut entraîner une déduction fiscale.
Il faut aussi évaluer attentivement l'intérêt de prendre une assurance invalidité. Parce que si jamais un travailleur autonome a un accident, ou une maladie qui l'empêche de travailler pendant des mois, voire des années, comment fera-t-il pour vivre et payer ses comptes?
Il est aussi possible d'inclure ces dépenses et ces risques dans le budget mensuel : un choix qui revient à chaque travailleur autonome, selon sa situation et ses besoins.
05Prévoir les vacances et jours fériés
Le nouveau travailleur autonome a souvent de la broue dans le toupet et travaille de façon acharnée pour faire sa place dans son domaine. Mais cela ne dure qu'un temps! Comme le salarié, il finit par avoir besoin de vacances pour recharger ses batteries, vivre de nouvelles expériences et passer du temps avec ses proches. Or, sans employeur, il ne bénéficie pas des deux semaines minimales de vacances payées par année ni des huit jours fériés et payés, comme le prévoit la Loi sur les normes du travail.
Le travailleur autonome doit donc budgéter ces périodes sans revenu pour pouvoir en profiter sans qu'elles affaiblissent sa capacité à honorer ses obligations financières et à épargner pour sa retraite. Il doit ainsi mettre davantage d'argent de côté qu'un salarié qui a l'aide de son employeur pour planifier de vieux jours agréables.
Tout compte fait, le travail autonome apporte une liberté certaine, notamment en matière de gestion de l'horaire, du choix du lieu où établir ses quartiers généraux, sans oublier qu'il offre l'avantage de ne pas avoir à rendre de comptes à un patron. Mais il entraîne aussi plusieurs responsabilités. Comme celle d'établir une stratégie d'épargne adaptée au statut de travailleur autonome en tenant compte de ses objectifs, de ses besoins et de sa réalité, avec l'aide d'un conseiller financier. Le travailleur autonome multiplie alors les chances que son après-carrière soit à la hauteur de ses attentes.