Avoir une entreprise à la retraite : bonne ou mauvaise idée?

Vendre, conserver ou acquérir une entreprise en vue de sa retraite, là est la question...

Par Fonds de solidarité FTQ

Le mot « retraite » rime habituellement avec « congé bien mérité », mais de plus en plus de retraités en profitent pour donner une nouvelle direction à leur vie en réalisant leur rêve de posséder une entreprise. Toutefois, la retraite est-elle vraiment un bon moment pour se lancer en affaires ou pour poursuivre sa carrière d'entrepreneur? Découvrez ce qu'une telle décision implique, en vous laissant inspirer par des témoignages d'entrepreneurs retraités ou d'ex-entrepreneurs qui sont devenus salariés à l'approche de la retraite.

L'entrepreneuriat chez les baby-boomers est en plein essor au Canada. Selon un rapport de la Banque CIBC paru en 2012, les retraités se retrouveraient actuellement aux commandes de 30 % des entreprises en démarrage au pays, une croissance de 100 % en 30 ans. À cette période de la vie, l'expression « maintenant ou jamais » peut ainsi prendre tout son sens et ouvrir de nouvelles portes à ceux qui osent s'aventurer hors des sentiers battus…

Générer un revenu d'appoint à la retraite

Selon une étude du cabinet McKinsey & Company datant de 2012, 23 % des ménages canadiens ne sont pas en mesure de préserver leur niveau de vie une fois la retraite arrivée. Avoir une entreprise peut donc permettre de générer un revenu d'appoint. C'est l'une des raisons pour lesquelles cette avenue est de plus en plus attrayante pour les gens qui songent à prendre leur retraite.

Pour y arriver, il faut toutefois être prêt à faire les efforts nécessaires. Comme le rapporte Dominique, une traductrice retraitée qui a acquis un verger avec son conjoint Francis, « acquérir une entreprise en guise de projet de retraite, c'est toute une aventure. Ce n'est pas un projet de retraite facile. C'est un projet pour des gens qui veulent travailler, qui ont beaucoup d'énergie et qui ont vraiment le goût de faire ça ». Et son conjoint renchérit : « Il faut commencer tôt, avoir le temps de le faire graduellement et ne pas s'épuiser. Sinon, c'est un deuxième début de carrière… À 55 ans, pédaler comme un fou, ce n'est pas tellement intéressant. » Il y a donc un revers à la médaille auquel il faut réfléchir avant de se lancer en affaires.

Marie a elle aussi ressenti l'appel de la terre. Après avoir pris sa retraite de l'enseignement, elle est devenue acéricultrice, dans la région des Bois-Francs. « L'acériculture a toujours été une passion depuis que je suis enfant. C'est la même chose pour mon conjoint. De temps à autre, nous aimions aller donner un coup main à la famille, dans le temps de la récolte. Petit à petit et en approchant de la retraite, nous nous sommes de plus en plus impliqués. Mes cousins étaient très occupés avec la ferme laitière et mes oncles vieillissaient. C'est tout naturellement, qu'à la retraite, nous avons proposé de prendre en charge la petite entreprise familiale », raconte-t-elle. Elle reconnaît toutefois que le risque financier était moins important pour son conjoint et elle puisqu'ils pouvaient compter sur la famille en cas de besoin et que les installations avaient une bonne valeur marchande en cas d'imprévu.

Limiter les risques de perte d'argent

Autre constat : à l'approche de la retraite, la réalité des entrepreneurs dans les « biens » est bien différente de celle de ceux dans les « services ».

En effet, les entrepreneurs travaillant dans les services spécialisés ou qui sont membres d'un ordre professionnel comme les comptables, les évaluateurs immobiliers, les podiatres, etc. comptent sur leur expertise comme principale source de revenus.

C'est entre autres pourquoi Céline, entrepreneure et ex-propriétaire d'une petite entreprise, a vécu une remise en question à l'approche de la quarantaine. En cas de maladie, elle savait qu'elle ne pouvait compter que sur son assurance invalidité, ce qui était un risque pour son entreprise puisqu'elle pratiquait une profession encadrée par un ordre professionnel et que ses employés étaient des employés de soutien. La valeur de son entreprise et la sécurité d'emploi de toute son équipe reposaient sur sa capacité à pratiquer son métier. En parallèle, après avoir travaillé d'arrache-pied pendant presque deux décennies, elle se demandait si elle voulait continuer à travailler autant pour les 15 à 20 années suivantes pour s'assurer une retraite confortable ou si elle préférait aller travailler dans une entreprise plus grosse qui lui assurerait une sécurité d'emploi et plus de vacances. Elle a finalement pris la décision d'aller travailler dans le privé parce que son travail était physique et qu'elle ne se voyait pas le faire elle-même sans une équipe de soutien plus grande après 55 ans.

Dans les produits, la réalité est différente puisque le fonds de commerce peut être vendu, de même que le stock, si la santé n'y est plus ou si les affaires ne roulent pas comme prévu. Si un entrepreneur achète une entreprise établie, comme une boutique, il peut généralement la revendre à juste prix en cas de besoin, et les biens immobiliers ont tendance à prendre de la valeur. Toutefois, s'il s'agit d'un démarrage d'entreprise, il est bon de suivre les principes de base en prenant le temps d'évaluer le marché et en s'assurant d'avoir un plan d'affaires solide.

Gérer des employés, la comptabilité, le marketing et les obligations

Finalement, ce n'est pas parce qu'une entreprise est un projet de retraite qu'elle ne demande pas de soins. Avant de vous lancer en affaires, il vaut donc mieux vous demander si vous êtes prêt à vous retrousser les manches, à aller puiser l'énergie nécessaire et, surtout, à vous écouter pour ne pas perdre de vue ce qui vous a donné envie de vous lancer en affaires au départ. Alors, peut-être que vous aurez envie de tout gérer, mais il faudra sans doute apprendre à déléguer afin de vous assurer que votre « vraie » retraite, quand elle arrivera, soit à la hauteur de vos attentes.

Marie a choisi de revoir ses priorités avec son entreprise familiale : « À notre âge, on n'avait pas le goût de gérer le stress relié au risque financier, alors nous avons laissé l'administration financière et toutes les obligations de gestion à même la ferme dirigée par mes cousins. Nous avons une entente de rémunération avec eux, ce qui nous permet d'avoir un revenu d'appoint et de nous gâter. Pour l'instant, on le fait parce qu'on aime ça et, lorsqu'on sera trop vieux, on laissera la place aux plus jeunes », rapporte-t-elle.

En vous posant les bonnes questions, en prenant le temps de vous écouter, en faisant appel aux bonnes personnes (il est judicieux de toujours consulter un avocat et un comptable) et en osant un peu, votre expérience d'entrepreneuriat à la retraite pourrait être très enrichissante. Il revient à chacun de voir et de vivre sa retraite comme il l'entend!

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