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Comment épargner quand nos revenus varient?

Voici comment réussir à épargner de façon régulière quand votre revenu est différent d'un mois à l'autre.

Par Fonds de solidarité FTQ

Si vos revenus sont différents d'un mois à l'autre, comme le sont ceux d'un travailleur autonome, d'un travailleur saisonnier ou un travailleur à pourboire, vous croyez peut-être qu'épargner est plus difficile que si vous étiez salarié? S'il est vrai que votre revenu peut varier et que vous n'avez pas de régime de retraite collectif, il n'en demeure pas moins que l'épargne vous est tout aussi accessible. Voici ce que deux travailleurs autonomes et deux experts disent sur le sujet :

  • Luba, traductrice et réviseure à son compte
  • Julie*, psychologue en bureau privé
  • Geneviève Millette, CPA auditrice, Pl. fin.
  • Antoine Laflamme, CPA auditeur, Pl. fin.

Le budget, votre meilleur allié

Les deux experts consultés s'entendent pour affirmer que la première étape dans toute stratégie d'épargne, c'est de faire un budget. Et c'est d'autant plus important pour les travailleurs autonomes ou à revenus variables. « Avant de se lancer à leur compte, les travailleurs autonomes doivent avoir un plan pour garantir leur succès : quel service propose-t-il, comment le vendre et à qui? Pour réussir à atteindre leurs objectifs d'épargne, c'est la même chose », explique Antoine Laflamme, CPA auditeur et planificateur financier.

« Il faut un plan! Et la première chose à faire, c'est un bon vieux budget. Même si vos revenus varient, certaines dépenses sont fixes. En les répertoriant et en les suivant de près, il vous sera plus facile de planifier vos besoins financiers. » – Antoine Laflamme, CPA auditeur et planificateur financier.

Au début, comme elle n'avait qu'un petit bassin de clients, Luba, réviseure et traductrice à son compte, ne réalisait pas l'importance de faire le suivi de ses finances chaque semaine. « Au fil du temps, alors que ma clientèle s'élargissait, cette nécessité m'est apparue, et j'ai été très contente d'avoir pris ces habitudes, dit-elle. Aujourd'hui, je tiens à jour un fichier Excel pour faire le suivi de ma facturation, mais aussi pour la TPS et la TVQ. »

De son côté, Julie, psychologue en bureau privé, fonctionne au mois pour déterminer si ses finances sont stables ou non. « Étant donné que mes dépenses sont relativement stables, je peux faire le point chaque mois et suivre facilement les entrées et les sorties d'argent. De cette façon, je sais exactement les revenus dont j'ai besoin. Je peux ainsi libérer des sommes que je dépose dans un compte d'épargne pour des dépenses imprévues, pour la maison ou le travail, selon le besoin. J'aime avoir le contrôle sur le montant que je mets de côté et l'ajuster de mois en mois. »

Un bon budget vous permettra de suivre les entrées et sorties de fonds mensuelles et ainsi d'évaluer votre capacité à épargner.

« Les revenus peuvent être instables et le travailleur doit pouvoir s'adapter. La gestion des coûts peut être difficile et parfois, si le suivi n'est fait qu'en fin d'année, on ignore qu'on travaille à perte, explique Geneviève Millette, CPA auditrice et planificatrice financière. Toutefois, même lorsque les revenus sont variables, il est possible d'en dégager une certaine stabilité mensuelle et de pouvoir épargner. »

Pour Julie, cette planification est en fonction de sa clientèle : « Une personne que je pensais voir chaque semaine peut annuler son rendez-vous ou réduire la fréquence de ses visites sans que je l'aie planifié. Je dois donc décider si je comble cette place tout de suite, quitte à avoir une surcharge, ou si j'attends un peu, le temps de faire le suivi avec le client ou de réévaluer mes disponibilités et assumer une perte de revenus. Planifier mon horaire à la semaine, ça devenait trop stressant. Aux deux semaines, ça me donne une meilleure vue d'ensemble. Et en faisant un suivi financier chaque mois, ça me permet de mieux voir l'état global de mes finances. »

Déterminer sa capacité à épargner

L'idée est d'intégrer l'épargne à la gestion de vos finances, comme une dépense courante, afin que ça devienne un geste ancré dans vos habitudes. « C'est le principe de se payer en premier, rappelle M. Laflamme. On ne le dira jamais assez; mettre un petit montant de côté chaque mois, dès que possible, c'est s'aider pour garantir sa stabilité financière et préparer sa retraite. Plus on commence à épargner tôt et à investir même un tout petit montant, plus on profite de la magie du rendement composé. Ça permet d'accumuler un montant plus considérable que d'investir un plus gros montant quelques années plus tard. »

Vous pouvez vous baser sur votre épargne annuelle moyenne pour déterminer votre capacité actuelle à épargner. Il suffit ensuite de répartir ce montant tout au long de l'année plutôt que de viser une seule cotisation plus grande.

Exemple : au cours des 3 dernières années, vous avez respectivement cotisé 5 000 $, 8 000 $ et 6 000 $ à un régime enregistré d'épargne-retraite (REER), pour une moyenne annuelle de 6 333 $. Cet objectif d'épargne pourrait donc être réaliste pour vous. En épargnant 122 $ par semaine, vous pourriez atteindre cet objectif.

Prévoir les impôts et les taxes à payer

« Mettre au minimum 30 % de ses revenus nets de côté permet de disposer de la somme nécessaire pour payer ses impôts et pour cotiser à son REER, recommande Antoine Laflamme. Et s'il reste de l'argent, ça devient de l'épargne forcée. »

En général, Geneviève Millette suggère à ses clients de placer 40 % de leurs revenus nets (revenus-dépenses) dans un compte épargne au fur et à mesure qu'ils perçoivent des revenus en vue de payer les impôts et les dépenses reliés à l'emploi.

Le pourcentage à mettre de côté dépend de plusieurs facteurs, dont vos revenus et vos dépenses. Demander des conseils personnalisés à un spécialiste, comme un fiscaliste ou un comptable, peut donc être très pertinent pour vous.

Planifier ses finances et son épargne

« Une fois qu'on a bien géré le volet professionnel de nos finances, qu'on a un bon budget et des outils de suivi en place, il est plus facile d'épargner pour la retraite ou pour atteindre des objectifs personnels », rappelle Mme Millette.

Pour Luba, l'objectif d'épargne est surtout une tranquillité d'esprit aujourd'hui et pour réaliser des projets éventuels. « J'ai un compte d'épargne et un CELI, auxquels je cotise mensuellement. Ma stratégie c'est de couvrir mes dépenses – qui sont sensiblement les mêmes de mois en mois – et d'épargner tout le reste. »

Il y a d'ailleurs autant de stratégies d'épargne qu'il y a de travailleurs. L'important, c'est de trouver ce qui répond le mieux à vos besoins et à votre réalité.

« Pour plusieurs travailleurs autonomes, surtout ceux qui débutent, le besoin de liquidité est important et peut être un enjeu. Donc, l'épargne automatique est plus difficile, ajoute Mme Millette. Pour y arriver, il faut commencer par créer un coussin qui permettra par la suite d'automatiser l'épargne, tout en tenant compte de possibles périodes plus creuses. »

Épargner à deux

Julie admet que sa situation personnelle a beaucoup influencé ses décisions professionnelles. « Mon conjoint a un travail stable et de bonnes conditions. On a donc décidé qu'il cotiserait à un REER pour moi, en vue de la retraite. Et le fait qu'il ait un revenu stable nous permet d'amortir les fluctuations de mes revenus qui ne sont pas garantis. Comme nous avons des enfants, cette stabilité est rassurante. On se trouve aussi des projets concrets qui nous stimulent à épargner, comme l'achat d'un bureau pour ma pratique privée. »

Épargner à deux peut d'ailleurs être une stratégie très avantageuse pour les couples. « Lorsque les revenus d'un des partenaires sont plus élevés que ceux de l'autre, il est alors possible de cotiser de son côté en imputant sa cotisation au conjoint. De ce fait, on procède à un transfert de propriété et l'imposition se fera du côté du conjoint et non pas du cotisant (après un certain nombre d'années). »

Quoi faire quand on n'arrive pas à épargner?

Finalement, gardez en tête que l'épargne se fait en fonction de vos revenus et de vos dépenses. Il existe plusieurs astuces pour arriver à dégager des surplus et à épargner. Faire un budget demeure une bonne première étape pour que vous puissiez déterminer toutes vos dépenses. Est-ce que certaines peuvent être éliminées ou réduites? Du côté de vos revenus, prévoyez-vous d'autres rentrées d'argent comme un remboursement d'impôt? Vous pouvez augmenter vos revenus sans augmenter votre salaire. Commencer à épargner, c'est un effort conscient. Mais vous verrez que c'est souvent plus accessible que vous ne le pensez!
 

Quand vient le temps d'épargner, assurez-vous que les objectifs que vous vous fixez sont réalistes et acceptez que la baisse de revenus puisse aussi engendrer une baisse de l'épargne. Vous pouvez toujours y adapter vos cotisations, en épargne automatique, car l'épargne doit être simple et ne doit pas devenir un stress financier supplémentaire. N'hésitez pas à consulter un spécialiste des finances personnelles pour obtenir des conseils propres à votre situation.

Notes
* Pour préserver l'anonymat, ce prénom a été changé.
 

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